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Constance van Eden
Membre honoraire de la SSC
2011

Constance van EEDEN, 1927-2021

Constance van Eeden, professeure émérite à l’Université de Montréal, professeure associée à l’Université du Québec à Montréal et professeure honoraire à la University of British Columbia, s’est vu décerner le titre de membre honoraire de la Société statistique du Canada. Cette distinction, annoncée lors du congrès annuel de juin 2011 de la Société à Wolfville (N-É), salue les contributions exceptionnelles de la professeure van Eeden au développement des sciences statistiques au Canada.

Constance van Eeden est née le 6 avril 1927 à Delft, aux Pays-Bas. Son père était enseignant au secondaire. En 1934, sa famille a déménagé à Bergen-op-Zoom, où Constance a étudié de la 2e à la 6e année, puis au secondaire jusqu’en 1944. Ensuite, elle est partie étudier à Amsterdam, la capitale, obtenant un B.Sc. (1949), un M.Sc. (1954) et Ph.D. (1958, avec distinction) de l’Université d’Amsterdam. Elle a rédigé sa thèse sous la supervision du légendaire David van Dantzig.

Sa carrière universitaire couvre un demi-siècle et trois nations : les Pays-Bas, les États-Unis, puis le Canada où elle a réalisé la plupart de ses travaux. Elle a débuté comme associée de recherche au Centre mathématique d’Amsterdam (1954-60). Sur l’invitation de Herman Rubin, elle a visité la Michigan State University à titre de professeure agrégée invitée (1960-61). Elle a ensuite travaillé à la University of Minnesota comme associée de recherche (1961- 64) et professeure agrégée (1964-65).

En 1965, van Eeden et son mari, feu Charles H. Kraft, dont la passion commune pour les mathématiques et la statistique les a menés à de nombreuses collaborations fructueuses, ont décidé de déménager au Canada et se sont installés à Montréal. Cette decision a été motivée en grande partie par de chaleureuses invitations de la part de Jacques Saint-Pierre, Maurice L’Abbé et Anatole Joffe. Sa longue association avec l’Université de Montréal a ainsi débuté en 1965, à titre de professeure agrégée (1965-68), de professeure titulaire (1968-88) puis de professeure émérite (1988-aujourd’hui). Après l’arrivée de Kraft et van Eeden, la ville a commencé à attire la visite de statisticiens célèbres, dont Jerzy Neyman, Lucien Le Cam, Jaroslav Hájek, Herbert Robbins et Hermann Chernoff, et à s’animer d’événements scientifiques en statistique. Depuis sa retraite de l’Université de Montréal, van Eeden est restée active, détenant des positions de chercheure associée (1989-91) puis professeure associée (1991- aujourd’hui) à l’Université du Québec à Montréal, et de professeure associée (1989-95) puis professeure honoraire (1995- aujourd’hui) à la University of British Columbia.

La professeure van Eeden est une scientifique de renommée internationale, connue pour ses importantes contributions dans les domaines de l’estimation dans les espaces de paramètres restreints, de la théorie de la décision, de la statistique non paramétrique et des procédures de sélection. Son travail révèle un grand courage intellectuel, de grandes compétences mathématiques et une grande originalité. On lui doit des fondements d’avant-garde en matière d’inférence dans les espaces de paramètres restreints avant que ce domaine n’attire l’attention des chercheurs. L’impact principal de ses travaux découle du fait que les procédures statistiques qui exploitent les restrictions de paramètres permettent d’importants gains en performance, par exemple une réduction significative de l’écart quadratique moyen des estimateurs par rapport à l’estimation non restreinte.

En collaboration avec son mari, feu Charles H. Kraft, Constance a aussi contribué à l’inférence statistique non paramétrique par des travaux de pointe. Pendant de longues années, « Kraft et van Eeden » étaient à la une de la discipline. Leur renommée n’a été qu’accrue par la publication de leur ouvrage novateur dans ce domaine : A Nonparametric Introduction to Statistics par C.H. Kraft et C. van Eeden, Macmillan Co., 1968.

L’enseignement et la supervision d’étudiants de cycle supérieur ont toujours été une priorité pour elle. À ce jour, van Eeden a supervise 14 étudiants au doctorat et 19 étudiants en maîtrise. Nombre d’entre eux sont devenus des chercheurs chevronnés, de St. John’s (T-N-L) à Vancouver (C-B). Elle n’a jamais hésité à donner de son temps pour conseiller les jeunes chercheurs, que ce soit sur une question de recherche spécifique ou sur un choix de carrière.

Toujours soucieuse des détails, van Eeden est célèbre dans le monde de l’édition. Elle a été la rédactrice en chef de Statistical Theory and Methods Abstracts (1990-2004) et leur rédactrice régionale pour le Canada et les États-Unis (1994-2004). Elle a été membre du Comité de rédaction des Annals of Statistics (1974-77), de La revue canadienne de statistique (1980-94) et des Annales des Sciences Mathématiques du Québec (1986-98). Depuis 2006, Constance a été réviseure pour les Mathematical Reviews. Tout au long de sa carrière, van Eeden a siégé à de nombreux comités scientifiques et professionnels, dont le Comité de sélection des subventions en sciences statistiques du CRSNG (1978-81) et son comité de sélection des bourses internationales (1990), le comité des fellows de l’IMS (1973-76) et son Conseil (1977-80), le Conseil d’administration de la Société mathématique du Canada (1981-83), le comité du Prix Noether (2001-03, 2004-06), ainsi que le comité des prix spéciaux de la SSC (1990-91) et le comité scientifique du congrès annuel de la Société tenu à l’Université Laval en 1987.

En reconnaissance de ses contributions, Constance a reçu de nombreux prix. Elle est fellow de l’Institut de statistique mathématique (1972), de l’Association des statisticiens américains (1972) et membre élue de l’Institut international de statistique (1978). En 1990, van Eeden s’est vu décerner la médaille d’or de la Société statistique du Canada, la plus haute distinction conferee par la Société. En 1999, l’Institut international de statistique lui a octroyé la médaille Henri-Willem-Methorst pour services insignes. L’IIS l’a aussi saluée avec un certificat de services en 2003. En 1998, le Département de mathématiques et de statistique de l’Université de Montréal a créé le Prix Constance-van-Eeden pour honorer ses contributions au développement de la statistique à l’Université de Montréal.

Dans un entretien paru dans Liaison en 2003, van Eeden a parlé de son adolescence pendant la Seconde Guerre Mondiale à Bergen-op-Zoom, aux Pays-Bas. Le jour de la Libération (27 octobre 1944) à Bergen-op-Zoom, Constance écrivait ses examens de fin d’études secondaires. Bertrand Clarke, l’interviewer, lui a demandé quells souvenirs elle avait de cette journée. Elle a répondu : « Je n’oublierai jamais le jour où les Canadiens sont arrivés. Il était deux heures du matin. J’ai entendu du vacarme dans la rue et ils étaient là. Mais nous savions déjà que les Alliés étaient en route. Nous les suivions en écoutant illégalement la BBC de Londres. La reconstruction après la guerre a duré bien plus longtemps qu’on ne le pense. Dans leur retraite, les Allemands avaient détruit tout ce qui aurait pu être utilisé contre eux. Le rationnement et les restrictions monétaires ont continué jusqu’au milieu des années 1950. »

Chaque année, Constance passe typiquement l’automne à UBC. Le reste du temps, elle vit aux Pays-Bas, à Broek in Waterland, village pittoresque d’environ 2 500 habitants et vieux de cinq cents ans, dans la région d’Amsterdam. Là-bas, elle est entourée de sa fille Kari, de ses frères et de ses nombreux neveux et nièces.

Citation Accompanying the Award / Criteria / Award Delivery

« À Constance van Eeden, pour ses travaux fondamentaux d’avant-garde en statistique et estimation non paramétrique dans les espaces de paramètres restreints; pour la qualité de ses travaux de recherche, notamment dans le domaine de l’édition au Canada et ailleurs; pour avoir si généreusement conseillé et inspiré des générations entières de statisticiens. »